jeudi 19 septembre 2013

Georges Braque, Grand Palais


" Le tableau avant tout c'est une aventure. Je pars à l'aventure vers le mystère des choses, leur secret. J'attends que ça se dévoile."

Cette exposition m'a permis de découvrir l’œuvre de Georges Braque dans toute sa diversité puisque le Grand Palais nous propose une rétrospective complète depuis les paysages fauvistes de l'Estaque et de La Ciotat (1906-1907) jusqu'aux oiseaux sur fond bleu de 1963, année marquant le décès de l'artiste.
On pourra apprécier le parcours de l'exposition qui nous guide à travers les différentes périodes créatives de l'initiateur du cubisme (fauvisme, cubisme analytique, cubisme synthétique,papiers collés) et nous fait partager le lien ténu que Braque entretenait avec la musique.
L'Estaque, 1906
Des lettres et cartes de vœux ainsi que des photographies de l'artiste sont également visibles. 
Héraclès, 1932
Mes œuvres préférées: les premiers paysages fauvistes débordant de couleurs, de parfums de Provence et de luminosité éclatante, le triptyque des gravures sur plâtre illustrant la Théogonie d'Hésiode, les derniers oiseaux.
Ce qui m'a étonné: la beauté de la virilité des Canéphores, le trompe-l’œil peint de carton ondulé sur les œuvres de papier collé, l'extrême connivence artistique avec Picasso (à tel point qu'il est parfois difficile d'attribuer une toile à l'un ou à l'autre!).

Une exposition très riche et chronologique du grand œuvre de Georges Braque à découvrir au Grand Palais jusqu'au 06 janvier 2014.


Deux oiseaux sur fond bleu, 1963

 

vendredi 28 juin 2013

Les trois chemins, Lewis Trondheim et Sergio Garcia

Avez-vous déjà entendu parler de l'OuBaPo?

À l'instar du fameux OuLiPo (Ouvroir de Littérature Potentielle) fondé par François Le Lionnais et Raymond Queneau en 1960 afin de stimuler la création littéraire expérimentale sous contrainte, les membres de l'OuBaPo, l'Ouvroir de bande-dessinée potentielle créé en 1992, s'imposent des contraintes artistiques.

L'ouvrage Les trois chemins de Trondheim et Garcia bouleverse le sens de lecture de la bande dessinée traditionnelle: plus de cases, plus de pagination, mais comme la couverture le préfigure, trois chemins qui débordent des pages... C'est ainsi que le lecteur/joueur est invité à tirer le fil de trois intrigues différentes: celle de la petite Roselita qui souhaite trouver le maître des nuages parce que son nuage personnel lui donne des pierres plutôt que du pain, celle du vieil avare John Mc Mac en quête de ses trois pièces d'or et celle du robot H.Deuzio coincé dans son bateau... Il arrive que les chemins s'entrecroisent et s'influencent, au lecteur de faire les sauts de puce qui s'imposent! Une construction narrative fort originale, un scénario sympathique bien qu'un peu simpliste pour ce récit initiatique à trois chemins! Le tome 2 qui adopte les mêmes ressorts met en scène un bébé pieuvre, un pêcheur qui n'aime pas l'eau et un scaphandrier aventureux... Jeunes candides intemporels, les personnages de cette série hors-norme cherchent la route à suivre et tout est bien qui finit bien! Certes, si l'ensemble est légèrement cousu de fil blanc, la trame n'en reste pas moins savante et savoureuse!
                                  

mardi 25 juin 2013

Les Éditions Fei

Les Éditions Fei ont été créées en 2009 par Xu Ge Fei, une jeune chinoise passionnée d'échanges culturels franco-chinois. L'intérêt de cette petite maison d'édition réside dans sa volonté de faire appel à des artistes et scénaristes français et chinois afin qu'ils collaborent sur des titres. Une belle initiative pour permettre au public occidental de découvrir l'Histoire et la culture chinoises. Le format original du livre de poche chinois a été adopté pour tous les titres, ce qui rajoute au charme de cette édition. La première publication de Fei a vu le jour début 2010 grâce aux talents du scénariste Patrick Marty et du dessinateur Chongrui Nie. Il s'agit d'un manga historique en noir et blanc, Juge Bao, qui rapporte le combat mythique du Juge Bao contre la corruption et l'injustice dans la Chine du XIIe siècle.
Début 2011, la série La Balade de Yaya remporte un franc succès auprès des lecteurs enfants comme adultes et a été sélectionnée par le Prix Livrentête 2012. Sur des tons pastels, dans une atmosphère lumineuse aux mille couleurs, Jean-Marie Omont et Golo Zhao nous racontent le début de la Seconde Guerre sino-japonaise (1937-1945)  à travers les yeux de deux enfants bien différents Yaya la petite bourgeoise et Tuduo le garçon des rues. 
À suivre...

vendredi 21 juin 2013

Dans ma discothèque, il y a...

Bonobo, Ketto

Bonobo est le nom d'artiste de Simon Green, compositeur et DJ anglais. Rythmes suaves, ambiance Trip-Hop, style un peu rétro. Une magnifique découverte en live. On glisse vers l'électro avec son album Black Sands, mon préféré.



Dans l'album: Days to Come

mercredi 15 mai 2013

Nos étoiles contraires, John Green

Quel bonheur d’avoir encore un bouquin pareil à découvrir !
Tout le monde parle de John Green et de son dernier roman, fabuleux, magistral, voire « qui frôle le génie » selon le Time Magazine qui l’a élu meilleur roman 2012. De quoi mettre la pression à tout lecteur potentiel ! Allais-je faire partie de l’unanimité approbatrice ?
Au début de ma lecture, ça m’a fait sourire. Je me suis dit : « voilà un beau roman pour ados avec des ados cyniques et caustiques comme il faut ! ». Et puis, je n’ai pas lâché le livre. Tant pis si les gens me voient la larme à l’œil dans le métro, tant pis si je ris en même temps que je pleure, tant pis si je loupe l’arrêt, tant pis si je ne dors pas beaucoup cette nuit, je lis Nos étoiles contraires, bon sang !
C’est une histoire aussi vieille que les étoiles, aussi éclatante qu’elles. C’est l’histoire de deux personnes qui s’aiment. C’est l’histoire d’Hazel Grace, seize ans, cancer de la thyroïde en stade terminal, amatrice de poésie, de télé-réalité et d’humour noir. Et d’Augustus Waters, dix-sept ans, unijambiste, séduisant séducteur qui achète des clopes pour ne pas les fumer, intelligent, généreux, pétillant – une bulle de champagne sur la Terre.   
On rencontrera aussi Isaac, futur aveugle, ado amateur de jeux vidéo et de roulages de pelles avec la belle Monica , Patrick, le miraculé des testicules, Peter Van Houten, l’écrivain, idole de la jeune Hazel, alcoolique et ventripotent.
C’est une histoire triste qui parvient à être drôle. Un livre qui fait réfléchir et relativiser. Un livre qui nous fait aimer la vie et qui nous fait aimer davantage les gens qu’on aime. Un livre qu’on voudrait ne pas avoir lu pour pouvoir le lire pour la première fois.
Chanceux, je vous envie…

mardi 14 mai 2013

Le Dernier Lapon, Olivier Truc

Je ne lis que très très peu de polars, ce genre ne m'attirant pas particulièrement. Mais au Salon du livre, j'ai rencontré M. Truc, journaliste français vivant à Stockholm depuis vingt ans, spécialiste des pays nordiques et baltes et j'ai eu envie de lire son livre.
Premier roman d'Olivier Truc, Le Dernier Lapon nous transporte par moins 40 degrés dans la toundra de la Laponie centrale. Tout semble calme et figé dans ces contrées glaciales et lointaines pourtant de lourds secrets bouillonnent sous terre et dans la mémoire des habitants de Kautokeino. En l'espace d'une quinzaine de jours, la vérité va éclater et faire la lumière sur une tragédie remontant au XVIIe siècle! 

Un tambour du patrimoine lapon est volé avant même d'être exposé, un éleveur de rennes est retrouvé mort les oreilles découpées, un géologue français s'intéresse de trop près aux jeunes filles de la région... L'inspecteur de la police des rennes, Klemet, et sa collègue Nina mènent l'enquête et les surprises jaillissent les unes après les autres jusqu'au dénouement final explosif. Qui est cet Aslak au regard magnétique qui vit comme un éleveur ancien sans scooter des neiges, boit du sang de renne au petit-déjeuner et castre son troupeau à coups de canines ? Que s'est-il passé durant l'expédition de Paul-Emile Victor en 1939 qui a causé la mort d'un géologue allemand? Quelle est la signfication du joïk, ce chant traditionnel sami, prononcé par Mattis juste avant sa mort?
Alors que la durée d'ensoleillement quotidienne augmente de quelques minutes au fil des pages, la lumière se fait sur l'intrigue policière brillamment nouée par Olivier Truc.
Un roman noir des plus lumineux sur la vie et les traditions du peuple sami. Un thriller haletant digne des plus grands polars polaires, une véritable aventure ethnologique!

vendredi 10 mai 2013

Deux jours en Bourgogne

Ou comment profiter de deux jours fériés d'affilée quand on ne fait pas les ponts de mai!

- Mardi 07 mai: train pour Dijon. Arrivée prévue à 22h30. Arrivée réelle: 23h. J'ai réservé une chambre à l'auberge de jeunesse Ethic Etapes de Dijon. Désillusion. L'énorme bâtisse excentrée n'a rien à voir avec les charmantes, ou du moins originales, petites auberges trouvées en Belgique, au Portugal ou dans mes voyages en Amérique du sud. L'ensemble hôtelier est austère, l'accueil froid et les prix élevés. La propreté de la salle de bain laisse à désirer et les nombreux claquements de portes nous réveillent à l'aube. Bref, une étape à déconseiller!

- Mercredi 08 mai: départ pour Beaune. Sur la route, nous nous arrêtons, intrigués par les toits magnifiques du château d'Aloxe-Corton. Petite marche dans ce village plein de charme et de tuiles.
Château de Corton André
Randonnée et pique-nique dans la "Montagne" de Beaune, une balade classique mais très agréable à travers les vignes et les forêts de pins.
Bien sûr, nous ne pouvions manquer la visite des hospices de Beaune! Les audioguides nous permettent de découvrir l'histoire de l'Hôtel-Dieu à travers les yeux de ses fondateurs, Nicolas Rolin et son épouse Guigone de Salins. En 1443, Nicolas Rolin souhaite faire œuvre de charité et dirige la fondation d'un hôpital gratuit pour y prodiguer des soins aux pauvres. Le lieu est digne d'intérêt pour son histoire et son étonnante conservation, témoin de l'architecture médiévale mais aussi pour les meubles et objets d'art qu'il contient. Sa pièce la plus célèbre demeure le polyptyque du Jugement Dernier de Rogier van der Weyden.
Après les tapisseries, place aux pâtisseries! Courte halte à la délicieuse pâtisserie Jean Ourvois, rue Carnot.
Marche dans le centre-ville sous petite pluie fine.
Alors que nous nous dirigeons vers le village de Pommard, nous remarquons un sympathique bar au bord du boulevard Maréchal Foch, le Café du Square. Nous nous rendons compte qu'il est grand temps de déguster un verre de vin en pays bourguignon! Bien nous en a pris! Le patron très accueillant nous propose une bouteille de vin blanc de Pernand-Vergelesses, sec et puissant, un bon choix! 
Le soir tombe, nous aurions aimé dîner au Goret, restaurant apprécié situé derrière la basilique de Beaune mais, victime de son succès, il était archi-complet.
Nous commandons alors une pizza à emporter et quittons Beaune afin d'installer notre campement sur les hauteurs de Pommard.

- Jeudi 09 mai: Mon héros nous prépare le thé matinal. Pas au Butagaz, non! Un fond de canette et un peu d'alcool à brûler suffisent! Pour en savoir plus sur ce réchaud à la Mc Gyver: http://www.randonner-leger.org
Vue sur Volnay
Promenade pédestre entre Pommard et Volnay, le sentier de randonnée est indiqué à partir de la place de l'église de Pommard. 
Quatre saucisses chez le boucher, du pain frais et c'est parti pour un barbecue au feu de bois dans les collines.
Direction Nuits-Saint-Georges pour une dégustation au château de Prémeaux, un régal! 

Deux souvenirs olfactifs et gustatifs inoubliables: le Côte de nuits Villages 2009, au nez puissant et envoûtant de cassis, coup de cœur du guide Hachette des vins 2013 et on comprend pourquoi! Et le Nuits Saint-Georges 1er cru «Clos des Argillières», fierté du Château, une forêt en bouche: champignons, bois humide et livres anciens, un goût fort et exceptionnel!
Retour sur Dijon, où l'on admire le centre-ville coquet et rénové à merveille suite à la récente installation du tramway, la cathédrale Saint-Bénigne imposante et majestueuse, l'église Saint-Michel, le théâtre créé au sein d'un lieu saint...

Deux jours en Bourgogne ou un merveilleux week-middle en amoureux!

mardi 7 mai 2013

Happy! de Naoki Urasawa

Je connaissais Naoki Urasawa pour ses mangas pour adultes si novateurs, piliers du manga-thriller: Pluto, Monster, 20th Century Boys. J'ai découvert il y a peu la saga d'Happy!  dont j'ai englouti en un rien de temps les huit premiers volumes (seuls disponibles dans ma médiathèque). La série compte quinze volumes en version Deluxe Panini.Plus ancienne, pleine de fraîcheur et d'optimisme, elle nous plonge dans l'univers sportif du tennis. Depuis le décès de ses parents, la jeune Miyuki Umino se charge tant bien que mal d'élever ses trois petits frères et sœurs à l'estomac insatiable tout en poursuivant ses études. Mais un jour, des créanciers débarquent chez elle et lui réclament la somme monumentale de deux cent cinquante millions de yens afin de rembourser les dettes de son frère aîné en fuite. Miyuki, décide de se remettre au tennis et de devenir championne. Elle rencontrera de multiples obstacles sur la voie de la victoire, néanmoins nombreux seront ceux à donner leur énergie et leur amour pour lui venir en aide: du voyou au grand cœur Sakurada à la joueuse professionnelle Kaku jusqu'au séduisant fils à maman Keïchiro Ohtori.
Je ne pensais pas accrocher à un manga sportif et pourtant j'ai été complètement em-ballée par l'intrigue efficace bien que simple et les dessins d'Urasawa. Umino, jeune sainte des temps modernes, bien souvent trop innocente et trop naïve va devoir affronter les humiliations, les moqueries et les jalousies du milieu professionnel du tennis. Elle sera notamment la victime docile et aveugle des malices de la star adulée du tennis junior, Choko Ryuugasaki.
Si on peut se lasser de ressorts narratifs répétitifs et du caractère crédule de notre héroïne, les tournois de tennis sont captivants et on ne veut plus lâcher le manga une fois en mains!


dimanche 5 mai 2013

FREADOM !

Organisée par la ALA (American Library Association), la semaine pour la liberté de lire, la Banned Books Week, est un événement annuel qui lutte contre la censure et prône le libre accès à l'information. Cette manifestation rassemble tous les acteurs et amateurs du livre: éditeurs, libraires, bibliothécaires, journalistes, enseignants et bien sûr, lecteurs! Parce que la censure existe encore lorsque des passages sont retirés d'ouvrages ou que des directives sont données aux écoles et aux bibliothèques afin qu'elles diffusent certains livres et pas d'autres...

Pour en savoir plus: http://www.bannedbooksweek.org/

samedi 4 mai 2013

Trois Femmes puissantes, Marie NDiaye

Tandis que le nouveau roman de Marie NDiaye, Ladivine, paru chez Gallimard en février dernier parle lui aussi de trois femmes aux prises avec le merveilleux et la pression de l'appartenance familiale, je publie enfin un article sur Trois Femmes puissantes qui valut à son auteure le prix Goncourt en 2009.

Il s'agit d'un roman composé de trois histoires qui nous dressent le portrait développé ou seulement suggéré de femmes entre la France et le Sénégal qui sont confrontées à la violence, la réalité décevante et douloureuse, la pression familiale, l'indifférence ou l'indécision des hommes mais qui luttent pour reprendre en mains leur destin.
Quel est le fil d'Ariane qui nous permet de lire ces trois récits comme une unité?
Qui sont ces trois femmes "puissantes" pourtant malmenées, humiliées, voire dégradées par la narration?

Il y a d'abord Norah, 38 ans, avocate parisienne, femme émancipée et ambitieuse qui accepte de se rendre en Afrique à la demande de son père alors que ce dernier l'a abandonnée trente ans auparavant pour acheter un village de vacances prospère au Sénégal et y élever son unique fils Sony. Confrontée à des souvenirs profondément ensevelis et à la déchéance d'un père autrefois dominant, Norah va tout faire pour sortir Sony de prison, accusé du meurtre de sa belle-mère. La puissance de Norah réside dans sa persévérance et sa détermination.

Il y a Fanta, devenue professeure de lettres au lycée Mermoz de Dakar par la force de son opiniâtreté et de son travail acharné. Fière, belle, intelligente, elle épouse Rudy Descas, un Français, svelte et beau parleur qui l'emmène au fin fond de la Gironde où elle perd peu à peu ses rêves, ses ambitions et son amour pour lui. Mais à travers le monologue intérieur de Rudy, elle apparaît comme une figure mystique et toute-puissante, buse menaçante qui conduit son époux sur le chemin de la réaffirmation de soi.

Enfin, le dernier récit nous présente, dans un réalisme violent, Khady Demba, une jeune veuve sans descendance, rejetée par sa belle-famille et forcée à l'exil. Khady, dans son calvaire vers la France, sera violentée par les hommes, trahie et volée par son compagnon de route, Lamine. Cependant, la tête haute, toujours, Khady criera au monde son existence jusqu'à la fin.
« De telle sorte qu’elle avait toujours eu conscience d’être unique en tant que personne et, d’une certaine façon indémontrable mais non contestable, qu’on ne pouvait la remplacer, elle Khady Demba, exactement, quand bien même ses parents n’avaient pas voulu d’elle auprès d’eux et sa grand-mère ne l’avait recueillie que par obligation- quand bien même nul être sur terre n’avait besoin ni envie qu’elle fût là. »

Si chacune de ces trois histoires raconte une brisure, Marie NDiaye délivre ses personnages au fil du récit et donne l'espoir d'une réconciliation, d'une réparation par le biais de la métamorphose et de l'allégorie des oiseaux.
La plume de Marie NDiaye, voluptueuse et tendre en surface n'en reste pas moins aiguisée et incisive, apte à dévoiler toute une profondeur introspective. Trois Femmes puissantes est une plaie béante qui invite le lecteur
à plonger au cœur de l’intime. Marie NDiaye donne une voix à ces femmes souffrantes qui endurent humiliation, violence et désillusion sans abandonner leur « inaltérable humanité ».
A travers ces trois récits, l’écrivain franco-sénégalaise nous conte l’histoire d’une épiphanie, celle de la métamorphose de femmes puissantes à qui l’on a coupé les ailes mais qui parviennent tout de même à prendre leur envol.
« C’est moi, Khady Demba, songeait-elle encore à l’instant où son crâne heurta le sol et où, les yeux grands ouverts, elle voyait planer lentement par-dessus le grillage un oiseau aux longues ailes grises_ c’est moi, Khady Demba, songea-t-elle dans l’éblouissement de cette révélation, sachant qu’elle était cet oiseau et que l’oiseau le savait. »




Qu'est-ce que la catégorie L'amour de lire ?

Aujourd'hui, je crée une nouvelle catégorie sur mon blog: L'amour de lire.
Sous ce libellé, je placerai des photos glanées de-ci de-là, je présenterai des maisons d'édition peu connues, des actions réalisées en faveur de la promotion de la lecture.
Bref, L'amour de lire me permettra de partager avec vous la beauté et la puissance des livres par des articles sérieux ou insolites!

jeudi 2 mai 2013

Bride stories, Kaoru Mori

Asie centrale, milieu du XIXe siècle. Amir est une cavalière hors-pair et sait manier l'arc comme personne! A vingt ans, elle doit épouser Karluk, un jeune garçon de douze ans qui appartient à un autre clan que le sien. Intimidée, la jeune femme tente de s'accoutumer aux usages et aux traditions de sa nouvelle famille: cuisson du pain, broderies, etc. Alors qu'elle commence à s'attacher à son époux et à s'intégrer à sa belle-famille, le frère aîné d'Amir est chargé de l'enlever pour la marier au chef d'un autre clan afin de contracter une alliance. Amir et son si jeune époux parviendront-ils à résister?
Kaoru Mori nous offre un superbe manga très bien documenté historiquement, aux dessins d'une précision et d'une finesse admirables. Une manière agréable de s'instruire!

dimanche 28 avril 2013

Dans ma discothèque, il y a...

Citizens! , True Romance
Groupe de rock londonien, Citizens!, sort un album extra-ordinaire en mai 2012, Here we are aux sons pop-rocks novateurs et stimulants. Bonne écoute!

vendredi 19 avril 2013

Le Beau Voyage, Springer & Zidrou

"Nous avons fait un beau voyage. Beau, beau, beau, beau, beau mais j'enrage [...]" Boby Lapointe

Léa est une jeune femme indépendante, provocatrice et moderne dont le présent subit le poids de nombreuses douleurs et déceptions: la mort de son petit frère Léo, l'inattention de son père médecin toujours trop occupé pour regarder ses dessins, la séparation de ses parents...
Lorsque son père décède, Léa apprend des vérités qui vont bouleverser sa vie.
Le récit, magistralement élaboré permet la reconstruction progressive du personnage principal, perceptible à travers l'allégorie de la piscine.
Une lecture poignante sur le travail de deuil et les traumatismes de l’enfance.
Malgré le dessin qui ne m'a pas trop plu, l'histoire est bouleversante et on lit la postface de Zidrou avec émotion.

mercredi 17 avril 2013

Je mourrai pas gibier, Guillaume Guéraud

L’histoire commence un jour de noces. Le méchoui dore au-dessus des flammes, les verres se remplissent, les enfants courent dans le jardin, tout le monde a l’air heureux jusqu’à ce que la robe blanche de la mariée se tache de sang et que les morts s’accumulent.
Martial est un jeune garçon de Mortagne, un village où la population se partage entre la scierie et la vigne et où les deux clans ainsi formés se haïssent depuis les premières générations. Martial a appris à être chasseur plutôt que gibier, à mépriser Terence, le benêt du village mais Martial se prend d’affection pour lui et ne supporte pas qu’on le maltraite. Ecoeuré par les us et coutumes de son village, l'adolescent se révolte et plonge dans une folie meurtrière.
Guillaume Guéraud ouvre la collection doAdo Noir (aux Editions du Rouergue) avec un récit court et brutal, le flashback poignant de la descente d'un jeune garçon dans le tunnel de la mort et de la haine.

A découvrir: l'adaptation en bande-dessinée par Alfred.

mardi 16 avril 2013

Dans ma discothèque, il y a ...

SBTRKT, Trials of the Past
SBTRKT, à prononcer "subtract", est le nom de scène adopté par  le DJ londonien Aaron Jerome. Connu pour porter des masque tribaux lors de ses performances publiques, il se distingue par une fibre électro-dubstep. Ce clip mélancolique et futuriste, réalisé par Ross Anderson, exploite l'univers SF de Blade Runner et marque par son originalité et sa qualité visuelle. L'esthétique androïde pourra nous faire penser à la nouvelle série d'Arte Real Humans.

Une semaine au Salon du livre de Paris!

Fin mars, juste avant deux semaines intensives de partiels, j'ai eu l'occasion de vivre l'expérience du Salon du livre de l'intérieur comme stagiaire libraire sur le stand de La Martinière qui fait près de 400m²! Ce grand groupe compte:
- les éditions du Seuil (depuis 2004) : dont Seuil Jeunesse, la collection de poche Points, les éditions Don Quichotte, les éditions Métailié et les éditions de l'Olivier.
- les éditions de La Martinière : dont De La Martinière Jeunesse, Delachaux et Niestlé (fonds sur la nature et la biodiversité) et Fetjaine (livres d'humour, sport, musique et actualité).

Mardi 19 mars: arrivée Porte de Versailles. Sensation étrange: la moquette et le mobilier principal (étagères, enseignes...) sont installés mais à part ça, tout est vide, pas de livres, pas de visiteurs!
D'énormes cartons surnommés cercueils nous sont livrés sur le stand, nous sortons et classons les livres afin de les ranger sur les étagères. Le soir tombe, des techniciens viennent installer des lampes sur les étagères.

Mercredi 20 mars: parce que le métier de libraire implique beaucoup de manutention, surtout pour une occasion pareille, la journée se résume à porter des cartons, monter et descendre des livres sur les étagères, créer des tables d'exposition. Il est assez amusant néanmoins de regarder les techniciens se débattre avec des fers à repasser pour coller les affiches et les bordures de caisses et d'étagères.

Jeudi 21 mars: derniers préparatifs afin que tout soit impeccable pour la soirée d'inauguration où les éditeurs, auteurs et autres personnalités sont conviés. Les plastiques protégeant la moquette sont retirés, tous les stagiaires se sont mis sur leur 31, les portes s'ouvrent! Notre mission: sourire, orienter les clients, vendre et surtout surveiller les vols. Je n'ai pas du tout apprécié cette soirée très mondaine où il est de bon ton de connaître tout le monde par son prénom, où un stagiaire est invisible, où certains abusent du champagne, où les gens fument et posent leurs verres collants sur les livres sans aucune considération... Fin de soirée: on nettoie les verres en plastique et autres déchets négligemment posés sur les caisses ou sur les livres, on congédie poliment le monsieur ivre au discours séducteur agaçant, on dépose des draps sur les tables de livres (on croirait des linceuls dans une maison hantée) et on quitte les lieux, l'estomac vide et les pieds en compote.

Vendredi 22 mars- Lundi 25 mars: il s'agit de la période d'ouverture du Salon au public. Je suis chargée de veiller sur le stand des éditions Métailié. Je connaissais cette maison seulement pour sa ligne de romans noirs (Indridason, Camilleri, Carlotto, Quadruppani, De Filippo, Delfino, Truc...) mais elle est également réputée pour son fonds hispano-américain. C'est la maison Métailié qui fera découvrir au public français l'auteur chilien Luis Sepúlveda. Ces quatre jours passés au milieu de la collection Métailié m'ont permis de mieux connaître leur fonds ainsi que leur ligne éditoriale et de découvrir la charmante équipe de cette maison. Une expérience enthousiasmante puisque les heures passant, j'ai l'impression de connaître les livres, j'en parle, je les conseille et suis toute ravie quand ils partent dans les mains de visiteurs conquis.
L'avantage à travailler au Salon du livre est de pouvoir assister à toutes les dédicaces de son stand. J'ai ainsi profité de la venue de nombreux auteurs du Seuil/ La Martinière: Luis Sepúlveda, Olivier Truc, Grand Corps Malade, Pascal Fauliot et Patrick Fischmann, Patrick Deville, Gilles Bachelet en jeunesse, etc.
L'inconvénient, c'est qu'on n'a pas le temps d'aller voir ailleurs ce qui s'y passe et qu'on est sûr de manquer les dédicaces des autres stands à part si elles ont l'heur de tomber durant la pause déjeuner (comme celle de Timothée de Fombelle ♥ ).
Le Salon s'est clos sur le rangement (bien plus véloce que l'installation!) des livres dans les cartons et sur une coupe de champagne partagée avec toute l'équipe de la librairie.

Bilan de cette semaine:
Je me suis rendue compte que j'aimais beaucoup défendre et vendre des livres, qu'échanger sur des avis et goûts de lecture était vraiment mon sujet de conversation préféré, qu'il me faudrait plus d'une vie pour lire et savourer le fonds d'une seule maison d'édition... Je suis devenue une groupie de Métailié où j'ai évidemment acheté plein de bouquins! Et là, je me dis qu'heureusement que je n'ai pas eu trop le temps de faire mon tour de Salon...
Tour d'horizon de mes dédicaces:



mercredi 20 mars 2013

Pourquoi être heureux quand on peut être normal ?

Réécrire les blessures de l'enfance, ne pas être réduite au silence, partager le pouvoir des mots, transcrire ses souvenirs, panser ses plaies, c'est pour ces raisons que Jeanette Winterson écrit.
« Je devais être capable de faire mon propre récit. Mi réalité mi fiction, voilà les ingrédients qui composent ma vie.[...] J'ai rédigé mon issue de secours. »
C'est effectivement une porte d'évasion qu'ouvre Jeanette Winterson à travers le récit de sa vie. Par une écriture du seuil, du trouble, Jeanette se cherche, se construit et s'affirme une identité propre et conquiert douloureusement sa liberté.

21 janvier 1960, John William Winterson, ouvrier, et Constance Winterson, employée de bureau, se rendent à Manchester afin d'y adopter un bébé et l'emmènent chez eux, au 200 Water Street, Accrington, Lancashire. Mais Mrs Winterson pense rapidement avoir choisi « le mauvais berceau » et que la fillette est un bébé du Diable!

Écrasée entre un père quasi inexistant et une mère mystique et castratrice qui pense que le monde est une "poubelle cosmique" où l'amour n'existe pas, la petite Jeanette essaie de survivre et d'aimer. La vie devient alors un combat : 
« J'ai lutté à mains nues quasiment toute ma vie. Dans ce genre de combat, le vainqueur est celui qui frappe le plus fort. »

Adolescente, alors qu'elle découvre son homosexualité, Jeanette est reniée et chassée par sa mère adoptive. Après avoir subi un exorcisme exigé par Mrs W., Jeanette décide qu' « il n'est jamais trop tard pour apprendre à aimer ». Elle partira dès lors, en quête du bonheur. L'apprentissage de l'amour sera un moteur essentiel dans cette quête, au même titre que la lecture.
En effet, ce sont les livres et la bibliothèque d'Accrington qui permettront à Jeanette de se sauver de la violence et du manque d'amour maternels et de se construire une identité. « Porte vers l'ailleurs », véritable « bouée de sauvetage », la littérature sera pour la fillette un remède, un espoir de liberté:
 « Un livre est un tapis volant qui vous emporte loin. Un livre est une porte. Vous l'ouvrez. Vous en passez le seuil. En revenez-vous? »

La lecture lui ouvrira bien une porte, celle de l'écriture. Après avoir lutté pour se construire et s'affirmer une identité sexuelle, Jeanette Winterson découvre son identité littéraire en devenant écrivain. Animée par le désir d'écrire, Jeanette y trouve un soulagement, un sentiment de libération. L'écriture est selon elle, une nécessité autant pour soi que pour autrui car l'acte d'écriture est un don, un partage, une ouverture au monde et aux autres.

Jeanette Winterson
Par le biais d'une écriture sincère et réflexive, Jeanette Winterson nous offre un récit intimiste qui mêle passé et présent, fait et fiction. La distance lucide dont fait preuve l'auteur permet d'apprécier la profondeur du récit sans tomber dans le pathos. Son écriture est fluide mais fragmentée, peu linéaire, à l'image de la vie elle-même: 
 « La vie est faite de couches, elle est fluide, mouvante, fragmentaire. Je n'ai jamais pu écrire d'histoire avec un début, un milieu et une fin parce que cela ne me paraissait pas fidèle à la réalité. Voilà pourquoi j'écris comme je le fais. Ce n'est pas une méthode; c'est moi.»
Par l'écriture, Jeanette Winterson se livre et se délivre et nous offre en partage le cadeau qu'elle a reçu: celui du pouvoir des
mots. Pourquoi être heureux quand on peut être normal? est le récit d'une vie, d'une quête de bonheur et d'identité qui donne envie de lire, d'écrire, de vivre.

Si vous aimez ce livre, vous pourriez apprécier: Vilaine: l’histoire vraie d'une enfant haïe par sa mère de Constance Briscoe.

lundi 11 mars 2013

Dans ma discothèque, il y a...

Rhye, Open

Escapade sur l'île d'Ouessant



phare du Créac'h

« Qui voit Molène voit sa peine,
Qui voit Ouessant voit son sang,
Qui voit Sein voit sa fin,
Qui voit Groix voit sa croix. »

Enez Eusa, île sauvage du Finistère était autrefois surnommée " l'île de l'épouvante" car les écueils et les forts courants marins qui l'environnent ont occasionné de multiples  naufrages.  Ses phares prodigieux protègent aujourd'hui le littoral. Profitant de ma visite à une amie très chère qui réside à Brest, je décide de partir à la conquête pédestre de cet îlot de roche et de vent, accompagnée de mon cher et tendre.

Après 2h30 de traversée maritime depuis la rade de Brest, nous accostons Ouessant. L’île offre à nos regards une terre aride, marquée par la force des vents et des tempêtes : très peu d’arbres, pas de relief, une lande parsemée de buissons épineux et d’ajoncs.  Nous décidons de poursuivre notre route à pieds car les sentiers côtiers ne sont pas accessibles aux vélos (en location dès l’embarcadère).
Les rivages sont superbes et sauvages. La côté dentelée abrite de multiples criques, grottes, plages de galets et de sable fin, frappées par les embruns, invitant à la découverte et à la rêverie. Des rocs surgissent de toute part aux alentours de l’île et stimulent notre imaginaire, faisant ressurgir du passé les naufrages, les histoires de pirates et de trésors enfouis. Nous profitons de cette journée exceptionnellement ensoleillée pour faire une sieste digestive sur l’herbe moelleuse en bord de falaise, un délice ! C’est la saison de l’agnelage et de petits agneaux noirs ou blancs à peine recouverts de leur manteau de laine se blottissent au creux des pattes de leur mère. 
Quelques heures de marche plus tard, nous atteignons la pointe du Créac'h avec son phare emblématique rayé de noir et blanc et ses à-pics rocheux. Ces paysages me rappellent ceux des îles anglo-normandes (Guernesey, Sark surtout) où je me suis rendue il y a deux ans. Le lieu idéal pour retrouver son âme de galopin et sauter de rocher en rocher, escalader des pics et braver les vagues…

Le soir tombe et nous restons sur la pointe du Créac'h afin d'admirer le coucher du soleil derrière les roches granitiques. L'air se rafraîchit et il est temps pour nous de dîner. Nous sommes lundi et un seul restaurant est ouvert, il s'agit du Fromveur dans le bourg de Lampaul. Dommage! Nous retrouvons nos compagnons de la traversée du matin dans une ambiance blafarde et silencieuse que le litron de cidre artisanal que nous avons commandé n'a pas suffi à compenser! Le retour nocturne à notre chambre d'hôtes située à l'autre bout de l'île s'avère une sacrée aventure! Éclairés par la puissance du phare du Créac'h, nous avançons au son des bêlements des agneaux en direction des petites veilleuses rouges placées sur le faîte des maisons environnant l'aérodrome ouessantin.

Le lendemain, la météo est bien moins clémente et les pieds plus endoloris! Le seul bateau de retour étant en milieu de journée, nous profitons de la matinée pour arpenter la pointe du Stiff. Voulant accéder à une grotte léchée par les vagues, je glisse sur les algues insulaires si particulières (on croirait des asperges géantes!) et voilà mon pied gauche dans l'eau salée! Nous rejoignons alors Stang Ar Glann, près du bourg, afin de trouver du réconfort dans la crêperie-salon de thé Chez Carole, abri parfait pour le marcheur amateur de bonnes galettes grillées! Le décor est charmant, des services à thé en porcelaine très british sont exposés et de nombreuses photographies en noir et blanc permettent au visiteur de se représenter l'histoire de l'île et de ses personnalités.

Des courbatures plein les pattes, nous rentrons de cette escapade émerveillés et conquis. Un vrai régal, gustatif autant que visuel!